Enseignement supérieur de plein exercice : on t’accuse d’avoir triché aux examens, quels sont tes droits ?
On t’accuse d’avoir triché aux examens ? Dans cet article, on fait le point sur les sanctions que tu risques, tes droits et les possibilités de recours.
On t’accuse d’avoir triché aux examens: qu’est-ce que tu risques ?
Les sanctions que tu risques en cas de triche/fraude aux évaluations doivent figurer dans le règlement général des études et/ou dans le règlement disciplinaire de ton établissement.
Il existe deux types de sanctions possibles :
1) Des sanctions dites « académiques » : par exemple obtenir la note de 0 à l’évaluation qui a fait l’objet de la fraude ou avoir toute ta session annulée.
2) Des sanctions disciplinaires : Il peut s’agir par exemple d’une réprimande, d’une exclusion temporaire ou encore une exclusion définitive de l’établissement.
Attention, l’application d’une sanction académique n’interdit pas l’établissement d’appliquer en plus une sanction disciplinaire.
Pour chaque type de sanction, on te conseillera de consulter le règlement pour vérifier les sanctions qui sont prévues, la procédure à respecter par l’établissement et les recours possibles. Les procédures diffèrent en fonction du type de sanction.
Avoir triché aux examens peut-il mener à une exclusion définitive ?
Oui, il est possible que tu sois exclu de l’établissement et il s’agit de la sanction disciplinaire la plus sévère.
Si tu es exclu pour une fraude aux évaluations, les conséquences sont les suivantes:
- Tu perds ta qualité d’étudiant régulier et tous les droits qui y sont liés : ton année est d’office en échec et tous les crédits validés pendant cette année académique là sont annulés.
- Tu restes redevable des frais d’inscriptions et tu ne peux pas être remboursé
- Tu n’auras en principe plus le droit de t’inscrire dans un établissement d’enseignement supérieur subventionné ou organisé par la Communauté française pour une durée de trois années académiques. Le délai de trois ans prend cours le premier jour de l’année académique durant laquelle la fraude est sanctionnée. Il s’agit donc plutôt de deux années académiques, en plus de l’année académique en cours. En pratique, les établissements n’inscrivent pas toujours l’étudiant sur la liste officielle des étudiants fraudeurs de sorte que, en cas d’exclusion définitive, il est possible que les étudiants puissent se réinscrire auprès d’un autre établissement subventionné ou organisé par la Communauté française.
La procédure disciplinaire : quels sont tes droits ?
Dans le cas où l’établissement envisage d’appliquer une sanction disciplinaire, il devra respecter la procédure prévue par le règlement des études et/ou disciplinaire ainsi qu’un certain nombre de règles générales qui visent à garantir les droits de la défense de l’étudiant et son droit à un « procès équitable ».
1. L’établissement doit apporter la preuve de la fraude
Tout d’abord, l’établissement doit établir la fraude avec une certitude suffisante. C’est à l’établissement de prouver que tu as triché et pas à toi de prouver que tu ne l’as pas fait. On dit que c’est eux qui ont la charge de la preuve.
2. Tu as le droit de savoir quels sont les faits qui te sont reprochés
Tu dois être averti précisément des faits qui te sont reprochés et de la sanction envisagée.
3. Tu as le droit d’être entendu avant qu’une sanction ne soit prise
Si on t’accuse d’avoir triché aux examens. Tu as le droit d’être entendu pour te défendre et donner ta version des faits. La sanction disciplinaire ne peut être adoptée qu’après ton audition. Attention, si tu ne te présentes pas à l’audition alors que ton établissement t’avait régulièrement convoqué, la sanction disciplinaire pourra être adoptée malgré ton absence.
À la suite de ton audition, l’établissement rédige en général un procès-verbal. C’est-à-dire un document qui retranscrit par écrit tes déclarations. Tu peux demander à ce que l’établissement reproduise tes déclarations selon les termes précis que tu utilises. Tu n’es pas obligé de signer le procès-verbal qui serait éventuellement établi. D’ailleurs, on conseille souvent à l’étudiant de ne pas le faire. En effet, il existe quasiment toujours une discordance entre ce qui est déclaré et ce qui est indiqué dans le procès-verbal car le processus de retranscription de l’information est nécessairement réducteur.
Par ailleurs, si tu ne souhaites pas te défendre oralement ou si tu souhaites compléter tes explications orales alors tu peux aussi exprimer tes observations par écrit.
4. Tu as le droit d’être assisté par la personne de ton choix
Tu as le droit d’être assisté à ton audition par un avocat ou la personne de ton choix. C’est d’ailleurs conseillé de te faire accompagner. Si besoin, tu peux consulter notre article « Besoins d’un conseil juridiques ou d’un avocat ? ».
5. Tu as le droit de consulter ton dossier disciplinaire avant ton audition
Tu as le droit de consulter ton dossier disciplinaire avant ton audition. Ce dossier contient en principe toutes les preuves qui serviront de base à la sanction. Il te permettra donc de préparer ta défense. L’établissement ne peut pas invoquer pendant l’audition des éléments nouveaux qui n’étaient pas dans ton dossier disciplinaire et auxquels tu n’as pas eu accès.
Tu pourras également demander d’obtenir une copie de ton dossier disciplinaire. L’établissement peut te demander de payer les photocopies au prix coûtant, soit 0,10 € par page.
Sauf si l’envoi automatique du dossier disciplinaire est prévu dans le règlement de ton établissement alors tu devras faire expressément la demande pour pouvoir le consulter et pour en obtenir une copie.
6. Tu as le droit de disposer d’un délai suffisant pour préparer ta défense
Tu as le droit de disposer d’un délai suffisant pour préparer ta défense et notamment d’un délai suffisant entre la consultation de ton dossier disciplinaire et l’audition. La durée de ce délai dépend des circonstances, par exemple de la complexité du dossier ou des disponibilités éventuelles de ton avocat. Si tu estimes ne pas avoir suffisamment de temps pour préparer ta défense alors demande un report de la date d’audition (et fais-le suffisamment tôt).
7. Tu as le droit de ne pas t’auto-incriminer
Tu as le droit de ne pas t’auto-incriminer et plus généralement de ne pas t’exprimer pendant l’audition.
8. Tu as le droit de déposer des preuves
Afin de prouver que tu n’as pas triché lors des examens, tu as le droit de déposer toutes les preuves qui te semblent utiles et/ou de demander à ce que des personnes soient entendues, dans les limites du raisonnable.
9. La sanction disciplinaire doit être prévue par le règlement
La règle est simple : seules les sanctions disciplinaires prévues par le règlement des études ou disciplinaire peuvent être prononcées par l’établissement.
10. La décision prononcée doit être proportionnelle aux faits
La sanction doit être proportionnelle aux faits. Cela signifie que la gravité de la sanction dépend de la gravité des faits : les sanctions les plus graves du règlement doivent être appliquées à des faits graves et les sanctions plus légères à des faits moins graves.
11. On ne peut pas sanctionner deux fois les mêmes faits
On ne peut pas appliquer une sanction disciplinaire à un fait qui a déjà fait l’objet d’une première sanction disciplinaire. Par contre, les établissements peuvent prendre une sanction disciplinaire même s’ils ont déjà appliqué une sanction académique pour les mêmes faits (par exemple, mettre une note de 0/20). De plus, rien n’interdit de tenir compte, dans le choix de la sanction, d’une éventuelle récidive.
12. La décision doit être prise par les autorités compétentes au sein de l’établissement
Le règlement définit quelles sont les personnes habilitées à prendre une sanction disciplinaire.
13. L’établissement doit communiquer sa décision et la motiver
L’établissement doit communiquer la décision par écrit à l’étudiant et celle-ci doit être motivée. Cela signifie qu’elle doit expliquer les raisons qui ont conduit à prendre cette décision (les règles juridiques qui ont été appliquées ; les faits reprochés et les éléments de preuve ; le lien entre la gravité des faits et la sanction). La motivation doit aussi répondre aux arguments donnés par l’étudiant.
Enfin, la décision doit indiquer les voies de recours pour contester cette décision.
Tu as été sanctionné pour triche : quels recours ?
Recours interne
Bien souvent, les établissements d’enseignement supérieur prévoient un recours « interne », c’est-à-dire un recours qu’il faut introduire auprès d’autorités qui relèvent toujours de l’établissement d’enseignement supérieur. Consulte le règlement des études et le règlement disciplinaire pour en savoir plus.
Il faudra introduire valablement le recours interne pour avoir le droit de former un recours externe. Autrement dit, si tu n’introduis pas de recours interne en suivant scrupuleusement la procédure alors ton recours externe pourra être jugé irrecevable.
Recours externe
Un recours externe peut être formé auprès du Conseil d’Etat si le recours interne n’a pas abouti à une décision favorable.
Il faudra généralement privilégier le recours en extrême urgence, à introduire dans les 10 jours qui suivent la décision contestée. La procédure judiciaire est complexe et technique. C’est pourquoi il est vivement conseillé (voire indispensable) de faire appel à un avocat.
Décret du 07 novembre 2013 définissant le paysage de l’enseignement supérieur et l’organisation académique des études, article 139/1
« Sanctions disciplinaires et exclusion dans l’enseignement supérieur », http://www.enseignement.be/index.php?page=24358, consulté le 01 juillet 2024